Un article de Luc Caron, PDG et Conseiller en management certifié
Les bouleversements récurrents et actuels de l’environnement, de l’économie et de la société compliquent la tâche de planification des dirigeants. Ils suscitent plus d’incertitude face à l’avenir et dans la prise de décision. Nous proposons des solutions face à cet enjeu, notamment la planification stratégique par scénario. Ainsi que le côté arbitraire de la durée d’un plan stratégique.
Comment planifier, si l’avenir est incertain?
Comment faire un plan stratégique dans un contexte incertain? Pensons au risque climatique, par exemple, qui n’est plus seulement une probabilité, mais une certitude? Certains chiffres parlent d’eux-mêmes, et peuvent heurter. Selon un étude de Aon, une firme mondialement reconnue dans l’évaluation de risques a dénombré 400 catastrophes naturelles en 2023 sur la planète!! (désolé de vous le rappeler). Mais il n’y a pas que des mauvaises nouvelles. Comme l’arrivée graduelle de l’intelligence artificielle, une révolution! Mais qui peut amener aussi des inquiétudes. Et qui aurait pensé il y a 10 ans, que le nombre de véhicules électriques augmenterait aussi rapidement? Il devient alors important de savoir garder la forme physique, et prendre du recul pour anticiper ces changements, plutôt que les subir. Et une planification stratégique ou un lac-à-l’épaule incluant des activités de « team building » font partie des solutions et moyens originaux pour garder confiance et transformer le changement en opportunités.
L’incertitude porte aussi en elle des opportunités!
Heureusement, les incertitudes, les changements représentent aussi des opportunités. Pensons à l’impact de la pandémie sur le télétravail. Qui tends aussi à diminuer la congestion routière et les coûts de transport pour se rendre au travail. Cela a aussi encouragé le retour de nombreux citadins hors des grands centres. Pensez aux employeurs qui ont des politiques favorables au « bleisure ». Cet art de combiner vacances et voyages d’affaires à l’étranger.
Le processus de réflexion est plus important que de prévoir exactement l’avenir!
Planifier l’avenir paraît encore moins possible en période d’incertitude. Or selon un article paru dans Les Affaires en 2019 : « Le processus de réflexion est souvent plus important que sa finalité. (Il n’y a pas de chemin qui mène au bonheur, le bonheur, c’est le chemin). Sans être parfait, ce type de planification permet d’évaluer la pérennité d’une stratégie». On parle alors de planification par scénario. De plus, un plan stratégique n’est pas un cadre statique. Il doit évoluer et être revu régulièrement.
Pourquoi les plans stratégiques s’échelonnent sur 3 à 5 ans?
Bien que la majorité des plans stratégiques s’échelonnent sur 3 à 5 ans, rien ne permet de déterminer objectivement l’échéance. C’est plutôt pour donner l’impression d’avoir une prise sur un avenir incertain. « Les beaux calendriers rassurent, ils laissent entendre que les événements peuvent être prédéterminés, le chaos maîtrisé et le succès préparé et garanti ». Pourtant, les forces qui agissent sur une entreprise, le font toujours sur des horizons de temps différent. Par exemple les changements dans l’économie mondiale entraînent des conséquences immédiates. Tandis que l’avancée de l’intelligence artificielle ou de la robotique connaissent des progrès graduels à plusieurs années d’intervalle. Par ailleurs, les mandats de nos gouvernements sont généralement d’une durée de 4 ou 5 ans (sauf exceptions). C’est probablement pourquoi les dirigeants politiques ont du mal à se détacher de l’impact à court terme, s’ils veulent être réélus. Mais cela est un autre débat.
Penser le court terme, en tenant compte du plus long terme
Les équipes dirigeantes des organisations sont prises dans un cycle de réactions tactiques qui les rendent vulnérables aux disruptions. Un peu comme appliquer des solutions du passé à des défis du futur. Bien que leur planification puisse être effectuée de façon sérieuse et rigoureuse, « il y a un risque de s’enfermer dans un cycle perpétuel de tentatives à court terme, pour rattraper des concurrents ».Par exemple : qui aurait pensé, il y a 10 ans, que les médias papier allaient disparaître? Pourtant, la multiplication des plateformes de communication et la présence grandissante des géants du Web GAFAM (Google, Apple, Facebook et Amazon et Microsoft) ont fait disparaître 1 800 journaux aux États-Unis entre 2004 et 2018. Certains médias ont toutefois su innover et anticiper le changement à long terme, ce que d’autres n’ont pas su éviter, entraînant leur disparition. On aurait donc tout intérêt à faire comme certains pays scandinaves et planifier sur 20 ou 25 ans. C’est ce que j’avais observé dans le cadre d’une mission commerciale à Stockholm, concernant l’aménagement d’une zone portuaire.
Accepter l’incertitude et explorer de nombreux scénarios
On doit apprendre à explorer à plus long terme, mais revoir sa vision régulièrement. Toutefois, plus l’horizon est loin, plus l’incertitude est grande et plus le nombre de scénarios à envisager doit être élevé. C’est certain que cela n’est pas dans nos habitudes et les prédictions risquent d’être erronées. Toutefois, l’exploration de différents scénarios (3 à 5 au moins) permet de préciser quels sont les éléments qui favorisent le changement ou ceux qui le freinent[7] .Cela met au défi les idées préconçues dans la direction. Mais favorise une pensée moins conventionnelle, qui permet de tester le succès potentiel des stratégies à long terme.
En conclusion : pensez intégrer la planification par scénarios, dans une vision à plus long terme
Bref, pour nous adapter au monde incertain actuel, et garder confiance nous devons penser à plus long terme, et savoir décrocher, se ressourcer. Afin de sortir de nos horizons tactiques et de nos pensées qui nous enferment dans des cycles à court terme. Et nous font croire que nous pouvons maîtriser le changement à l’intérieur d’un horizon déterminé de façon arbitraire, de 5 ans. Il faut aussi envisager la planification par scénario. Car elle permet de d’anticiper et de concilier des changements externes plus complexes et imprévisibles avec les facteurs internes ou sectoriels, plus prévisibles et plus familiers dans l’organisation.