Un article de Luc Caron, PDG, consultant et animateur d’expérience
D’où vient ce terme méconnu?
Commençons par démystifier ce qu’est un lac-à-l’épaule. Cette expression de chez nous tire son origine de l’emplacement d’un important lieu de réunion historique au Québec.
Le lac-à-l’épaule, qui fait maintenant partie du Parc national de la Jacques-Cartier, a entre autres accueilli les hommes politiques Churchill et Roosevelt au cours de la Seconde Guerre mondiale en 1944. Ils avaient alors effectué une sortie de pêche durant la Grande Conférence de Québec. Cet endroit fut aussi l’hôte, en 1962, du cabinet de Jean Lesage qui s’y était réuni en secret pour traiter de la question de la nationalisation de l’électricité. C’est donc depuis 1962 que l’expression « tenir un lac-à-l’épaule » fait partie de notre vocabulaire.
D’un point de vue administratif, il s’agit en fait d’une réunion de réflexion stratégique interne ayant lieu à huis clos, idéalement dans un endroit inspirant qui favorise l’ouverture et le dialogue. Les meilleurs lac-à-l’épaule sont ceux qui créent un environnement unique, un climat accueillant, inclusif et engageant, où chacun y est confortable de s’exprimer librement.
Dans quel contexte devrait-on envisager de tenir ce type de réunion stratégique?
- Une réunion de planification, habituellement annuelle, constitue une raison courante d’organiser une activité de type lac-à-l’épaule. Généralement, on y brosse un portrait de la situation de l’organisation en plus d’établir les lignes directrices à court, moyen et long terme. Elle peut aussi être axée sur un projet en particulier, une problématique à adresser, l’amélioration continue ou encore faire le point sur les fondements de l’organisation, de sa raison d’être (identité, modèle d’affaires, fusion, etc.).
- Dans d’autres cas, un lac-à-l’épaule peut être organisé en réponse à une situation particulière qui affecte considérablement les activités de l’entreprise. Pensons à la pandémie de la Covid-19 et ses impacts, par exemple.
Si vous vous retrouvez dans l’une ou l’autre de ces situations, voici 5 conseils qui vous permettront d’en tirer un maximum de bénéfices, tout en mobilisant votre équipe derrière une vision commune et rassembleuse :
Le calcul vaut le travail, comme dit le dicton. La préparation, une priorité, quelles que soient les motivations ou ambitions
- Établissez clairement vos objectifs et attentes concernant la rencontre (sujets prioritaires à discuter, enjeux à approfondir, échéanciers, etc.)
- Choisissez un lieu qui invite à la créativité et l’ouverture; un endroit paisible favorisant la réflexion et la coopération.
- Ayez recours à un animateur hors pair. Une personne ayant un talent naturel, qui inspire confiance.
- Si vous choisissez un établissement de type hôtelier, informez votre hôte de votre horaire, afin que le service de pauses et de repas s’intègre à votre programme.
- Ne soyez pas trop rigides dans l’ordre du jour. Si vous voyez que vous touchez un sujet sensible, prenez le temps d’aller au fond des choses pour éviter le flou et les angles morts. Il faut donc avoir une marge de manœuvre dans l’horaire pour ces situations.
- Vous devez aussi tenir compte de la dynamique interne entre les participants, puisque la réflexion demeure l’objectif principal, pas la confrontation.
Identifier et poser les bonnes questions au bon moment: les bases d’une réflexion efficace
- Commencez par des questions pour briser la glace en permettant aux participants d’exprimer ce qui ils sont, ce qu’ils ressentent ou leur état d’esprit (émotions), avant d’aborder les sujets les plus costauds (ou rationnels). Et faire place à l’humour constitue un des trucs importants pour le succès de votre lac-à-l’épaule.
- Pour y arriver, prenez le temps d’identifier quels sont les enjeux réels de votre organisation. Vous pouvez demander à vos pairs de réaliser le même exercice en vue de comparer les possibilités.
- N’hésitez pas à sortir des sentiers battus pour réfléchir autrement, car vous aurez une occasion unique pour prendre du recul.
L’ambiance et la communication authentique, le secret d’une expérience mémorable
- Pour créer l’ambiance, vous pourriez intégrer à l’événement, par exemple, une marche ou un repas informel entre collègues sur des thèmes particuliers. Des activités sportives ou des jeux peuvent aussi favoriser les échanges et l’ouverture.
- N’hésitez pas à inclure des activités de discussion originales qui permettent d’allier le formel à l’informel. Créez des sous-groupes avec mises en situation afin de défaire les silos entre départements ou d’aborder certains sujets selon l’angle de chacun des départements ou des équipes.
- Dès le départ l’animateur aura pris soin d’établir un climat de respect et de camper certaines règles de communication qui vont notamment accepter les divergences d’opinions, les points de vue différents sans jugement. D’une idée anodine ou étrange au départ, peut jaillir une idée de génie. L’animateur donnera donc la chance à tout le monde de s’exprimer et saura encadrer les « trop bavards ». On ne cherche pas la meilleure réponse, mais plutôt de nouvelles réponses possibles.
- Le style d’animation aura un impact important sur l’ambiance. L’animateur devrait pouvoir naviguer avec aisance à travers les incertitudes et ne pas paniquer devant les moments de silence.
- Ne craignez pas de faire face aux sujets tabous et de braver la tempête lorsque nécessaire. La maturité d’un groupe grandira si on réussit à traiter et résoudre les tensions, les conflits latents.
La transparence, l’authenticité sont de précieux alliés, dans la mesure où l’animateur a su instaurer une communication respectueuse entre participants. Les règles de la communication non violente[1] pourraient vous être utiles en ce sens :
- Observer sans évaluer
- Identifier et exprimer ses besoins et ses sentiments
- Faire une demande avec sincérité
- Recevoir avec empathie
Faire des constats réfléchis, pour des actions ciblées
- Prenez le recul nécessaire afin de pouvoir regarder tous les angles possibles. Cette étape sera ardue en raison de votre implication.
- Évitez de tirer des conclusions trop hâtives. Parfois, on peut confondre un symptôme avec le problème de fond.
- Validez les constats avec vos collègues.
Au terme du lac-à-l’épaule, dressez une liste de priorité ou un plan d’action pour mobiliser l’équipe autour d’une vision commune
- Les actions à entreprendre doivent répondre directement aux enjeux.
- Il devrait y avoir au moins une action par enjeu cerné.
- Pour que ce plan ne se retrouve pas sur la tablette, vous devez établir des échéances réalistes et désigner un responsable pour le suivi de chaque action priorisée.
- Quelqu’un devra être désigné comme le gardien et du suivi de l’ensemble du plan d’action afin que des résultats concrets en découlent.
Pour tirer le maximum de votre lac-à-l’épaule, nous pouvons vous aider. Notre regard externe vous permettra de prendre le recul nécessaire pour aborder les questions délicates avec objectivité.
Nous offrons un accompagnement sur mesure, que ce soit pour la préparation, l’animation, pour dresser des constats ou formuler des recommandations.
Le journal le Devoir nous a d’ailleurs consulté sur le sujet : https://www.ledevoir.com/economie/640017/des-lacs-a-l-epaule-pour-se-ressourcer
[1] Source : https://www.revuegestion.ca/la-communication-non-violente-un-outil-pour-favoriser-de-bonnes-relations-au-travail